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Philosophie Magazine, no. 16 (Épicure)

Philosophie Magazine, no. 16 (février 2008), 98p. [10.50$]

Le Dossier a pour thème « Je travaille donc je suis ? ». Dans la section « Du cœur à l`ouvrage », cinq spécialistes dessinent les frontières actuelles du travail et tentent d`éclairer nos problèmes d`adaptation. Ainsi, Guillaume Le Blanc, philosophe et professeur à Bordeaux-III mentionne que « travailler, c`est réaliser les règles prescrites, mais c`est aussi être en mesure de les détourner » (p.39). Le sociologue Michel Lallement rappelle, en parlant de la situation de chômeur, que « le temps du non-travail condamne souvent au confinement dans l`espace domestique, au repli sur soi » (p.40). Le psychiatre Christophe Dejours signale que « La solitude immense dans laquelle vivent les individus au travail aujourd`hui a d`ailleurs plus d`incidences sur la santé mentale que le harcèlement, qui a toujours existé. Ce délitement du collectif au travail déteint dans toute la société » (p.41). Pour sa part, Étienne Tassin, professeur de philosophie politique à Paris-VII, considère que « Ce qui importe est de réinventer les formes et la signification de son travail à l`écart des hiérarchies sociales et des représentations normatives » (p.42). Enfin, Philippe Raynaud, professeur de sciences politiques à Paris-II, affirme que dans cette relation au travail où l`imaginaire capitaliste perdure, celle-ci ne peut pas être commune à tous les individus, y compris et surtout dans une société libérale. Et celui-ci d`ajouter « Si tout le monde n`avait comme finalité que l`accumulation, la société libérale s`autodétruirait » (p.43).

Dans son article « Le bonheur en prime », l`essayiste Alain de Botton fouille le passé et met en perspective nos difficultés actuelles. Il retrace ici la généalogie de la valeur travail. Selon lui, « S`il est aujourd`hui si difficile de trouver le bonheur au travail, c`est que nos prétentions ont dépassé la réalité » (p.48). Puis, Antonio Negri, professeur de philosophie à l`université de Padoue, propose une analyse marxiste du travail contemporain. Il allègue qu`à l`ère post-industrielle « L`exploitation ne repose plus sur le surtravail mais sur la vie en commun. Dans les métropoles, c`est le tissu social, la vie en commun de la multitude des singularités en réseau, qui est devenu le tissu productif. […] L`exploitation contemporaine est d`autant plus difficile à contrer qu`elle n`est pas imposée du dehors par le capitaliste : c`est la vie du commun qui est engagée dans le processus. Cette situation confirme l`indication de Marx : dans un monde sans dehors, la logique de la production capitaliste finit par englober la totalité de la vie » (p.51). Dans le dernier article du dossier, le sociologue Richard Sennett analyse la flexibilité du travail. Pour ce disciple d`Hannah Arendt, nous ne sommes pas condamnés à être malheureux au travail. Il suggère d`« adopter une nouvelle tournure d`esprit, capable de prendre en compte les nouvelles formes du capitalisme moderne pour s`y adapter de façon constructive et leur redonner un sens humain » (p.53).

La rubrique Entretien recueille les propos du philosophe canadien Charles Taylor. Interrogé par Delphine Boisserie, il traite ici du concept d`authenticité. À cet égard, il est d`avis que « Si je ne suis pas sincère, je rate ma vie et ce que représente pour moi le fait d`être humain. Tel est l`idéal moral si puissant dont nous avons hérité. […] Être sincère envers soi signifie être fidèle à sa propre originalité et c`est ce que je suis seul à pouvoir dire et découvrir » (p.57).

La section Biographie est consacrée à Épicure (341-270 av. J.-C.). Dans son article intitulé « Épicure ou la mauvaise réputation », la journaliste Marion Rousset explique qu`« Épicure conçoit la philosophie moins comme une discipline de l`esprit tournée vers les affaires de la cité que comme une médecine qui se pratique à huit clos. […] Devant la décadence de l`empire, le philosophe préfère aux agoras la sérénité d`une enclave intime, les discussions entre amis » (p.62). Puis, Jean-François Balaudé, professeur de philosophie à l`université Paris X-Nanterre présente la pensée épicurienne par le biais d`un lexique : plaisir, douleur, désirs, bonheur, etc.

En guise de supplément, un Cahier central (16 pages) avec une préface de Marcel Conche, professeur émérite de philosophie à la Sorbonne. Il contient la Lettre à Ménécée, présentée et traduite ici par Marcel Conche ainsi que les Sentences Vaticanes.

Info. : www.philomag.com [1]