Étudiante au Cégep de Trois-Rivières, récipiendaire du Prix 2018 au Concours d'écriture sur les Femmes Philosophes (Prix 2018).

[NDLR : nous publions ici le texte de Sarah Sediri, étudiante lauréate du 3e prix de 100$ à l’édition 2018 du Concours d’écriture sur la présentation de femmes philosophes.]


 

Par Sarah Sediri

(Lauréate 2018 du 3e prix

au Concours d’écriture sur la présentation de femmes philosophes)

 

Citation : « Un enfant est une ligne lancée à l’aveugle dans le future… Comme une idée, ou un livre : qui sait où ils retomberont, et ce qui naîtra d’eux ? » – Annabel Lyon

 

L’auteur est au livre, ce que la mère est à l’enfant : leur créateur.

Au cœur de la citation, Annabel Lyon compare l’enfant à une idée ou un livre. Ceux-ci ne sont que des concepts jusqu’à ce qu’ils naissent, de l’esprit ou des entrailles du créateur, et ainsi, rejoignent le monde tangible. L’enfant et le livre prennent source à l’intérieur du créateur, mais ont chacun leur particularité. En ce qui regarde l’auteur, son intériorité correspond à ses réflexions, ses processus cognitifs, les pensées non dites et non écrites, son inconscience même, jusqu’à dire son âme. Quant à la mère, son génotype est ce qui lui est intrinsèque. Pour ces deux grands créateurs, ce qui leur est le plus inhérent est aussi ce qui leur est de plus précieux, ce qui est véritablement la seule chose qui leur appartient, qui est inatteignable, ce qu’on ne pourra jamais leur enlever, ainsi, ce qu’ils ont de plus pur. Ensuite, comment prendre cet intérieur et le projeter en quelque chose qui leur est externe ? Comment arrivent-ils à exposer au monde entier ce qu’ils ont de plus précieux à l’intérieur ? Le créateur le fait bien. L’auteur publie son livre, la mère donne naissance à son enfant. Ce sont leur produit respectif. Produit de leur tête, produit de leur corps.

 

La philosophe symbolise le lien d’attachement fusionnel qui unit le créateur à son produit comme une ligne, cette ligne lancée à l’aveugle dès le moment où le créateur lance son œuvre fœtale ou cognitive dans le monde extérieur. L’auteur façonne son livre ou son idée à sa guise. Il l’écrit tel qu’il l’interprète, selon ses idées et sa manière de penser. Par contre, dès que toutes ces composantes sont exposées à l’extérieur de lui, par la publication et le partage, il ne peut contrôler ce qu’il suscitera comme réactions chez l’auditoire, ni même quel auditoire il rejoindra. La mère fait de même avec son enfant. Elle façonne sa progéniture au mieux de ses capacités. Elle le fait à partir du moment où il baigne tout doucement, ballotant dans le liquide protecteur maternel, jusqu’au moment où il devient plus grand et réceptif aux valeurs, à la culture, à la morale que la mère lui inculque. Puis, la mère laisse à lui-même l’héritier de ce bagage génétique et idéologique. Il bondit de ses bras, bagage en main, et qui sait où il va retomber, tel que la philosophe le souligne.

 

Il reste à s’interroger sur les motivations du créateur à produire ce quelque chose d’unique et de représentatif de lui. D’abord, c’est pour s’assurer une continuité de son essence en tant qu’humain. C’est une forme d’affirmation et de réalisation de soi également. C’est d’écrire son histoire, de se donner une deuxième vie, léguer un héritage. Finalement, c’est pour aussi, dans tous les cas, ne pas tomber dans l’oubli, laisser sa trace à l’humanité.

 

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