Récipiendaire du 1er Prix 2022 au Concours d'écriture sur les Femmes Philosophes (Prix 2022).

NDLR : Nous publions ci-dessous le texte de Lanka Hamelin, récipiendaire du 2e Prix au concours d’écriture Femmes Philosophes 2022 qui s’est déroulé dans le cadre de la 10Semaine de la philosophie. Toutes nos félicitations à Lanka Hamelin !

_____________________________________________________________

Émilie du Châtelet (1706-1749) est une philosophe de l’époque des Lumières, critique des moralistes. Compagne de Voltaire, elle marche dans les pas de Lucrèce, défendant une thèse épicurienne. Le bonheur est le but de la vie et pour atteindre ce bonheur, les plaisirs modérés sont la clé.

 

Bienvenue au 21e siècle. Bienvenue au théâtre de la vie où tous les numéros de plus en plus grandioses sauront vous garder en haleine. Bienvenue dans la société des plaisirs où l’éros torture les esprits. Cette société où libéralisme et capitalisme reçoivent le préfixe « hyper » en leur devant. De nos jours, ces termes ne sont que l’ombre de ce qu’ils évoquaient autrefois; auparavant libérateurs, prometteurs d’une vie meilleure, ils sont désormais les chaînes qui détiennent l’âme humaine. L’avarice de l’Humain consomme l’essence de son existence. Amplifiée par les réseaux sociaux, la cupidité humaine ronge la moelle épinière du bonheur. L’Humain se promène à la recherche de sa prochaine dose de dopamine, désirant toujours plus, un être à jamais insatisfait par sa propre existence. Défilant sur son téléphone, par les réseaux sociaux, des images édéniques retouchées hantent les yeux vitreux des spectateurs; vie mensongère peaufinée, sélectionnée avec soin; une vie absolue. Une vie inatteignable, même pour ceux à l’origine de ces publications insidieuses. Bombardé de publicités exploitant les failles tailladées dans l’insatiabilité de l’Humain, par le désir d’éluder sa vie de tous les jours, il dépense le fruit de son labeur pour quelconque babiole qui finira tôt ou tard dans les ordures. S’acheter du prestige, se donner une illusion de vie parfaite tandis que des cartes de crédit saturées s’accumulent dans le fond d’un tiroir; l’anxiété de devoir tout repayer. Agonisant dans la boîte à chaussures qu’il nomme appartement, l’Humain se noie, plaisirs trop vite dépensés, toujours insatisfait. Il continue de défiler sur son téléphone.

 

Ne serait-ce pas plus simple d’embellir ce qu’il a déjà, plutôt que de recouvrir son mal-être d’un rien déjà oublié au fond d’une penderie déjà trop remplie? Du Châtelet disait : « Je crois qu’une des choses qui contribuent le plus au bonheur, c’est de se contenter de son état et de songer plutôt à le rendre heureux qu’à en changer. » Ce n’est pas en cherchant le bonheur ailleurs que l’Humain pourra l’atteindre, c’est en le cherchant dans l’accessible, dans la vie actuelle, plutôt que de chasser un rêve dicté par l’opinion des autres, dicté par le désir de plaire. À force de vouloir trop changer, l’Humain perd la quintessence de l’existence.  Apprendre à aimer les petits plaisirs de la vie, à se satisfaire de ces derniers, romancer sa vie en défilant à travers les rues de la ville, en discernant l’odeur d’un café fraichement moulu le matin, ou encore tout simplement en tournant les pages d’un livre; voici des plaisirs simples d’une vie qui se permettrait d’être elle-même, sans filtre, indéniablement réelle.

DE GAUCHE À DROITE SUR LA PHOTO :

Émilie Lefrançois (directrice adjointe à l’organisation scolaire), Samuel Racette (3e prix), Lanka Hamelin (2e prix), Marie-Pierre Dufresne (1er prix), Naïma Hamrouni (professeure titulaire de la Chaire de recherche du Canada en éthique féministe), Mylène Carpentier (directrice générale de la fondation du Cégep de Trois-Rivières).