SOMMAIRE
Présentation
L`année 2016 marque l`entrée du philosophe français Michel Foucault dans « La Pléiade », la prestigieuse collection des Éditions Gallimard. Il y rejoint d`autres philosophes tels : Alain, Camus, Descartes, Machiavel, Malebranche, Marx, Montesquieu, Pascal, Rousseau, Sartre, Spinoza, Voltaire mais surtout ceux qu`il lut attentivement : Platon, Aristote, Diderot, Kant, Sade et Nietzsche.
C’est le 5 novembre 2015 que parurent les deux volumes regroupés sous le titre Œuvres dans la prestigieuse collection. Auteur de plusieurs ouvrages à son sujet, c’est le philosophe Frédéric Gros qui dirige la publication des œuvres de Michel Foucault par la Pléiade. Histoire de la folie, Naissance de la clinique, Les Mots et les Choses, L’Archéologie du savoir, L’Ordre du discours, Surveiller et punir, les trois volumes de L’Histoire de la sexualité ainsi qu’une sélection d’articles vont ainsi être rassemblés.
Michel Foucault, Œuvres, édition publiée sous la direction de Frédéric Gros, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », novembre 2015, respectivement 1712 p. pour le tome I (n°607) & 1792 p. pour le tome II (n°608), 59.50 € jusqu’au 28 février 2016, puis 65 € chaque volume.
Tome I : no. 607, 1712 p., 65 € (109.95$); ISBN : 978-207-013-452-6
Introduction, chronologie, note sur la présente édition ; Histoire de la folie à l’âge classique, Naissance de la clinique, Raymond Roussel, Les Mots et les Choses ; notices et notes.
Tome II : no. 608, 1792 p., 65 € (109.95$); ISBN : 978-207-013-453-6
Chronologie, avertissement, L’Archéologie du savoir – L’Ordre du discours – Surveiller et punir – Histoire de la sexualité I, II, III ; articles, préfaces, conférences ; notices et notes, bibliographie ; index par Arianna Sforzini et Daniele Lorenzini.
Chacun des deux volumes est relié pleine peau sous coffret illustré. Ils sont disponibles en coffret commun, au pris de 219.95$.
Bibliothèque de la Pléiade
La Bibliothèque de la Pléiade est une des collections majeures de l’édition française, publiée par les éditions Gallimard. Elle constitue une référence en matière de prestige, de qualité rédactionnelle et de reconnaissance littéraire des écrivains. Être publié dans « La Pléiade » représente une sorte de consécration pour les écrivains et seul un nombre réduit l’ont été de leur vivant. Actuellement, elle publie non seulement les œuvres majeures de la littérature française, mais également de la littérature mondiale.
Créée en 1931 par Jacques Schiffrin dans le cadre de ses Éditions de la Pléiade (1923), la collection de la « Bibliothèque reliée de la Pléiade » est rachetée par Gallimard le 31 juillet 1933, Jacques Schiffrin en conservant toutefois la direction. Le premier dessein de la collection est de proposer, au format poche, les œuvres complètes des auteurs classiques, en préservant un grand confort de lecture. D’où le papier bible, le petit format, la couverture de cuir souple et le soin porté à la composition typographique. Après-guerre, la « Pléiade » devient aussi une collection de référence, par le renforcement de son appareil critique. La collection trouve son équilibre entre fonds et nouveautés, littératures classique et contemporaine, refonte de ses anciennes éditions (Camus, Rimbaud, Montaigne…), œuvres françaises et étrangères ; elle étend son programme au-delà des seuls catalogues de Gallimard ou de ses filiales, accueillant par exemple les œuvres de Julien Green, François Mauriac, Julien Gracq, Claude Simon ou Marguerite Duras… André Gide sera le premier auteur contemporain à y entrer de son vivant dès 1939, suivi par onze autres jusqu’à Milan Kundera en 2011. Plus de huit millions d’exemplaires vendus depuis 1933.
Dirigée par Jacques Schiffrin de 1931 à 1940, Jean Paulhan de 1941 à 1946, puis placée sous la direction de la famille Gallimard (Raymond et son fils Michel, Robert puis Antoine Gallimard), la «Pléiade» bénéficie des apports scientifiques et éditoriaux de ses directeurs littéraires successifs : Jean A. Ducourneau (1959-1966), Pierre Buge (1966-1987), Jacques Cotin (1988-1996) et, depuis 1996, Hugues Pradier.
Au début 2014, la collection regroupe près de 800 ouvrages et plus 250 auteurs (hors ouvrages collectifs) : Bibliothèque de la Pléiade : 686 volumes ; Albums de la Pléiade : 52 volumes ; Encyclopédie de la Pléiade : 54 volumes.
Tous les titres de la collection sont imprimés en garamond, sur papier bible, et reliés en pleine peau dorée à l`or fin. À chaque époque correspond une couleur : havane pour le XXe siècle, vert émeraude pour le XIXe, bleu pour le XVIIIe, rouge vénitien pour le XVIIe, corinthe pour le XVIe, violet pour le Moyen Âge, vert pour l`Antiquité; les textes sacrés sont reliés en cuir gris; les anthologies, en rouge de Chine.
Michel Foucault et son oeuvre
Son œuvre traite principalement des méthodes des historiens, notamment des historiens des idées. Elle se situe à l`intersection des sciences humaines, de l`épistémologie et de l`histoire. Pendant un temps, Foucault estime lui-même que son travail est plus proche de l`activité historienne que du philosophique. Bien que les historiens ne le considèrent pas comme un des leurs, il peut sans doute être reconnu comme un philosophe mais aussi comme un historien, au moins de fait comme l`atteste son goût pour les archives.
Ses ouvrages sur l`histoire de la folie, des prisons et de la sexualité sont considérés parmi les plus importants des cinquante dernières années. Plus encore, chacun de ses livres a provoqué une petite révolution dans le monde de la pensée.
Intellectuel phares des années 1960-80, il fonde, dans une perspective structuraliste, une « archéologie du savoir », c`est-à-dire une mise à jour du système cohérent de toutes les opérations intellectuelles sous-jacentes à la culture d`une époque donnée. Rappelons que si dans les médias, il est un temps étiqueté « structuraliste », il rejette lui-même par la suite cette appellation et désavoue les tendances structuralistes décelables dans la première partie de son œuvre.
Repères biographiques
Il naît sous le nom de Paul-Michel Foucault, le 15 octobre 1926 à Poitiers (Poitou-Charentes) dans une famille de notables. Son père, avec lequel il est en conflit dès l`adolescence, est chirurgien à l`hôtel-Dieu de Poitiers et veut que son fils prenne le relais. Sa mère se nomme Anne Malapart et son frère Denys.
Mentionnons que c`est dans la ville de Poitiers qu`en novembre 1616, le philosophe français René Descartes (1596-1650) obtient son baccalauréat et sa licence en droit civil et canonique à l’Université de Poitiers. Soulignons également que le philosophe français Emmanuel Levinas (1906-1995) est professeur de philosophie à l’Université de Poitiers au début des années 1960.
De 1930 à 1940, il fréquente le Lycée Henri-IV de Poitiers, puis le collège Saint-Stanislas à la rentrée 1940. En 1943, après son baccalauréat, il entre en hypokhâgne pour préparer le concours de l`École normale supérieure de la rue d`Ulm. Après un premier échec, il quitte Poitiers et entre en khâgne au Lycée Henri-IV, à Paris. En 1946, il est reçu à l`École normale supérieure (ENS), de la rue d`Ulm. Là, il rencontre le philosophe français Louis Althusser (1918-1990), devenu en 1948, à son retour de captivité du Stalag de Schleswig (Allemagne), répétiteur de philosophie. Il rédige son diplôme d`études supérieures sur le philosophe allemand Georg Wilhelm Friedrich Hegel (1770-1831) sous la direction du philosophe français Jean Hyppolite (1907-1968). En 1948, il obtient sa licence de philosophie à la Sorbonne. La même année, il fait une tentative de suicide au rasoir qui le conduit dans le bureau du psychiatre et neurologue Jean Delay (1907-1987), au Centre hospitalier Sainte-Anne. Cet événement représente son premier contact avec l`institution psychiatrique. En 1949, il obtient une licence en psychologie.
En 1950, il adhère au Parti communiste, qu`il quitte en 1952. En 1951, il est reçu deuxième à l`agrégation de philosophie. La même année, il entre pour un an à la Fondation Thiers (institution française destinée à assister le début de carrière d’étudiants considérés comme prometteurs). Toujours en 1951, il devient répétiteur de psychologie à l`École normale supérieure. Il travaille également comme psychologue à l`hôpital Sainte-Anne dans le service du professeur Jean Delay. Il fréquente les milieux psychiatriques et suit le séminaire du psychiatre et psychanalyste Jacques Lacan (1901-1981). De 1951 à 1955, il enseigne à Ulm et à Lille. En 1953, il remplace Louis Althusser comme assistant de philosophie à l`École normale supérieure.
En 1954, il fait un stage à la clinique dirigée par le psychiatre Roland Kuhn (1912-2005) à Münsterlingen en Suisse où il s’initie à la psychiatrie phénoménologique. La même année, il publie Maladie mentale et personnalité (PUF, coll. « Initiation philosophique »; rééd. coll. « Quadrige »), travail commandé par Louis Althusser, ouvrage d`inspiration marxiste. De l`automne 1955 à 1958, grâce au linguiste et philologue français Georges Dumézil (1898-1986), il est conseiller culturel à l`Université d`Uppsala, en Suède. C`est là qu`il rédige pour l`essentiel une thèse sur l`anthropologie du philosophe allemand Emmanuel Kant (1724-1804) et sa thèse d`État : Folie et Déraison. Histoire de la folie à l`âge classique qui a pour rapporteur le philosophe français Georges Canguilhem (1904-1995). Sa thèse retrace l`histoire des représentations de la folie depuis la Renaissance. En 1958, il quitte la Suède pour Varsovie pour y ouvrir le Centre de civilisation française et d`études francophones, dont les principales modalités sont l’organisation de conférences et la contribution à des publications. Il y fut directeur de novembre 1958 à juillet 1959. En 1959, il quitte la Pologne et prend la direction de l`Institut français de Hambourg jusqu`en 1960.
En 1960, il fait la connaissance de Daniel Defert, élève à l`École normale supérieure de Saint-Cloud. En avril 1960, après plusieurs déconvenues aux Éditions Gallimard, c`est l`historien français Philippe Ariès (1914-1984), pionnier de l`histoire des mentalités qui accepte de publier Folie et Déraison, qui sort un an plus tard chez Plon dans la collection « Civilisations et mentalités », en mai 1961. L`ouvrage montre comment les « pratiques de division » qui séparent les gens en catégories, « saint d`esprit » et « fou », fonctionnent comme une forme de contrôle social. Mentionnons que les 5000 exemplaires tirés sont rapidement épuisés. Entre 1963 et 1972, seule une édition abrégée est disponible dans la collection 10/18 (20,000 exemplaires en sont vendus chaque année). En 1972, Foucault décide de rééditer l`ouvrage chez Gallimard sur les conseils du philosophe français Gilles Deleuze (1925-1995), il supprime sa première préface et ajoute une réponse aux critiques que le philosophe français Jacques Derrida (1930-2004) lui fit en 1963, intitulée « Mon corps, ce papier, ce feu ».
Le 20 mai 1961, devant un jury composé du philosophe français Henri Gouhier (1898-1994), de Georges Canguilhem et du médecin et psychanalyste français Daniel Lagache (1903-1972), il soutient en Sorbonne sa thèse de doctorat sur l`histoire de la folie. Également présents lors de sa défense, les philosophes français Jean Hyppolite et Maurice de Gandillac (1906-2006) sont chargés de faire soutenir la thèse secondaire de Foucault : Genèse et structure de l`Anthropologie de Kant. La même année, il est élu à la faculté de Clermont-Ferrand au poste de maître de conférences de psychologie. À cet endroit, il y retrouve les philosophes Jules Vuillemin (1920-2001) qui y enseigne de 1950 à 1962 et Michel Serres qui y est également professeur. En 1961 toujours, il publie Histoire de la folie à l`âge classique (U.G.E., rééd. Gallimard, coll. « Tel », 2007), son premier livre choc. Il cherche à comprendre comment, pendant ce qu`il appelle « l`âge classique » (XVIIe XVIIIe siècles) s`opère en Occident un partage décisif qu`il découvre entre raison et déraison, qui conduit notamment les pionniers de la psychiatrie à définir la folie comme une « maladie mentale ». Or, pour lui, c`est notre société qui exclut, et ses institutions inégalitaires et répressives qui créent la folie.
Toujours en 1961, il inaugure une série d`émissions radiophoniques sur France Culture, « Histoire de la folie et littérature ».
En 1962, il publie Maladie mentale et psychologie (PUF, coll. « Initiation philosophique »), version remaniée de Maladie mentale et personnalité (1954). La même année, il fait la connaissance de Gilles Deleuze, alors attaché de recherche du CNRS. Il cherche à faire nommer ce dernier, professeur à l`Université de Clermont-Ferrand, contre le philosophe et écrivain français Roger Garaudy (1913-2012).
En 1963, il entre au conseil de rédaction de la revue mensuelle Critique, fondée par l`écrivain français Georges Bataille (1897-1962) en 1946; il y reste jusqu`en 1977. La même année, il publie Raymond Roussel (Gallimard, coll. « Le Chemin »; rééd. coll. « Folio »). En 1963, il publie Naissance de la clinique : Une archéologie du regard médical (PUF, coll. « Histoire et philosophie de la biologie et de la médecine »; rééd. coll. « Quadrige »). Dans cet ouvrage, il interroge la naissance de la médecine moderne et l`érection de la maladie à l`âge classique comme principe universel de description du corps humain. À la même époque, Il fréquente le groupe de l`écrivain Philippe Sollers qui anime la revue de littérature d`avant-garde Tel quel (Seuil), fondée en 1960.
En 1966, il est nommé professeur de philosophie à l`Université de Tunis. Il s`installe dans le village de Sidi Bou-Saïd, à vingt kilomètres au nord de Tunis. C`est là qu`il connaît les révoltes anti-impérialistes de Tunis et qu`il protège les étudiants contre la répression qui s`abat sur eux. C`est dans ce même lieu qu`il rédige L`Archéologie du savoir. En avril 1966, il publie Les Mots et les Choses : Une archéologie des sciences humaines (Gallimard, coll. « Bibliothèque des Sciences humaines »; rééd. coll. « Tel », 2008) dans lequel il annonce « la mort de l`Homme ». Véritable best-seller philosophique, l`ouvrage lui acquiert bientôt une notoriété internationale. Dans cet ouvrage, il soutient que l`être humain est, à son insu, assujetti à des structures qu`il ne maîtrise pas; il marque également un tournant critique dans la manière dont la philosophie et les sciences humaines peuvent ou non penser « l`homme ».
Au début de l`année 1968, il est nommé professeur de psychologie à l`Université de Nanterre qu`il ne rejoint pas. Il est plutôt pour organiser le département de philosophie de la nouvelle université expérimentale de Vincennes où il enseigne durant une année. Là, il y côtoie le philosophe français Jean-François Lyotard (1924-1998) et Gilles Deleuze qui y enseignent aussi.
En 1969, il crée la section Philosophie de l`« université pilote » de Vincennes. Il s`agit de l`établissement universitaire créé en 1969 par l`État français dans la section parisienne du bois de Vincennes en réponse aux révoltes étudiantes de « Mai 68 ». Gilles Deleuze et Alain Badiou y enseigneront. En 1969 également, il publie L`Archéologie du savoir (Gallimard, coll. « Bibliothèque des Sciences humaines »). Dans cet ouvrage, il explique son projet d`« archéologie ». Il montre comment ses travaux, loin de nier l`histoire (prenant acte des nouvelles manières de « faire l`histoire ») multiplient les possibilités d`« événements ».
En 1970, il est nommé professeur au Collège de France à la chaire d`« Histoire des systèmes de pensée » où il enseigne dans des salles archipleines. Il occupe cette même chaire jusqu`à sa mort.
À partir de ce moment, il renouvelle profondément le statut de l`intellectuel associant écriture théorique et activisme politique libertaire, notamment en faveur des prisonniers ou des minorités sexuelles.
Le 21 juin 1971, il participe à une conférence de presse sur l`affaire Jaubert (journaliste tabassé dans un autocar de police) en compagnie du metteur en scène Pierre Laville, de l`écrivain et journaliste Claude Mauriac (1914-1996), de l`écrivain et avocat français Denis Langlois ainsi que de Gilles Deleuze. En 1971 aussi, il publie L`Ordre du discours (Gallimard). Il s`agit de sa Leçon inaugurale au Collège de France, prononcée le 2 décembre 1970. Il y recense les contraintes qui pèsent sur le discours en général. En 1971 toujours, alors qu`il donne un cours sur les institutions pénales, il fonde avec l`historien français Pierre Vidal-Naquet (1930-2006) et l`écrivain et intellectuel français catholique Jean-Marie Domenach (1922-1997), le Groupe d`information sur les prisons (GIP) qui marque le début d`une série d`actions visant à dénoncer la sombre réalité pénitentiaire.
En 1973, il participe avec le philosophe français Jean-Paul Sartre (1905-1980) à la création du quotidien français Libération. La même année, il publie Moi, Pierre Rivière (Gallimard-Julliard, coll. « Archives »; rééd. coll. « Folio »). L`ouvrage fait l`objet d`un film du réalisateur français René Allio (1924-1995) en 1978 : « Moi, Pierre Rivière, ayant égorgé ma mère, ma sœur et mon frère… » (125 min.).
En 1975, il publie Surveiller et punir. Naissance de la prison (Gallimard, coll. « Bibliothèque des histoires »; rééd. coll. « Tel », 2003). L`ouvrage explore les « micro-pouvoirs » à l`œuvre dans la société en deçà des instances politiques dirigeantes, du système des lois ou des problèmes de classes auxquels la pensée politique confine jusque-là la question du pouvoir.
La même année, il visite pour la première fois l`Université de Berkeley, en Californie.
En 1976, il publie Histoire de la sexualité T. 1 : La Volonté de savoir (Gallimard; rééd. coll. « Tel »). L`ouvrage prend le contre-pied du mouvement de libération sexuelle des années 1960-1970 pour débusquer les raisons qui nous poussent non seulement à penser que le sexe a été longtemps réprimé, mais aussi à sentir la nécessité de dire la vérité sur le sexe et, en dernier lieu, à penser cette nécessité comme une émancipation. Le 29 mars 1976, il prononce une conférence à l`Université de Montréal dans le cadre de la Semaine du Prisonnier, sur le sujet très controversé des « Alternatives à la prison ». En 1976 toujours, il publie La Volonté de savoir (Gallimard; rééd. coll. « Tel »). L`ouvrage soutient la thèse que, dans les sociétés modernes, la sexualité n`est pas seulement réprimée mais aussi produite et provoquée.
En 1977, il organise, en compagnie du philosophe et écrivain français Jean-Paul Sartre (1905-1980), une contre-manifestation au Théâtre Récamier contre la réception, à l`Élysée, du secrétaire général du Parti communiste de l’Union soviétique Leonid Brejnev (1906-1982) par le président de la République française Valéry Giscard d`Estaing. Les deux penseurs y accueillent des dissidents de l`Est.
En 1978, il publie Herculine Barbin, dite Alexina B (Gallimard, coll. « Les Vies parallèles »). La même année, il donne un cours au Collège de France intitulé « Sécurité, territoire, population ». À la fin de 1978, il se rend à Téhéran (Iran) après le massacre de la place Jaleh, dans le cadre d’un reportage pour le Corriere della Serra, qui initie une série de reportages effectués par des intellectuels.
En 1979, il donne un cours au Collège de France intitulé « Naissance de la biopolitique ». La même année, il organise au Collège de France une conférence de presse, qui réunit les philosophes Jean-Paul Sartre et Raymond Aron (1905-1983), sur l`accueil en France des « boat people » sauvés en mer de Chine par le bateau l`Ile-de-Lumière et l`équipe de « Médecins du monde » par le médecin et homme politique français Bernard Kouchner. À l`époque, il voyage beaucoup : Californie, Japon, Brésil, Iran.
En 1981, au moment de la déclaration de l`état de guerre en Pologne, il lance, en compagnie du sociologue français Pierre Bourdieu (1930-2002), un appel contre les propos du ministre des Relations extérieures Claude Cheysson (1920-2012), qui déclare qu`il s`agit d`une « affaire intérieure ». En 1982, il publie Désordre des familles (Gallimard-Julliard, coll. « Archives ») en collaboration avec l`historienne française Arlette Farge. Il s`agit des lettres de cachet des archives de la Bastille. Le 4 septembre 1982, il est reçu en compagnie de l`historien Pierre Nora, de l`écrivain et journaliste Jean Daniel et du philosophe Alain Finkielkraut, à l`Élysée à propos du Moyen Orient. En 1983, à l`occasion d`une manifestation, il proteste contre les détentions arbitraires dans les prisons en Argentine. En 1984, il publie Histoire de la sexualité. T. 2 : L`Usage des plaisirs (Gallimard, coll. « Bibliothèque des histoires »; rééd. coll. « Tel »). L`ouvrage se consacre aux discours sur la sexualité des médecins et philosophes grecs du IVe siècle av. J.-C. En 1984 toujours, il publie Histoire de la sexualité. T. 3 : Le Souci de soi (Gallimard, coll. « Bibliothèque des Histoires »; rééd. coll. « Tel »). L`ouvrage porte sur les textes grecs et latins des Ier et IIe siècles apr. J.-C.
Le 2 juin 1984, il subit un malaise et s`évanouit dans son appartement de la rue Vaugirard (15e arrondissement de Paris), où il habite avec son compagnon Daniel Defert. Il est transporté à l`hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris. Il y meurt le 25 juin à l`âge de 57 ans, emporté par le sida. Le 29 juin, une brève cérémonie a lieu à la Salpêtrière. Michel Foucault est enterré au cimetière de la commune de Vendeuvre-du-Poitou (Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes).
Depuis son décès
En 1986, plusieurs de ses amis (Arlette Farge, François Ewald, Michelle Perrot, Yves Roussel) décident de créer l`Association pour le Centre Michel-Foucault dans le but de rassembler l`ensemble des travaux du philosophe et de permettre aux chercheurs de les consulter. En janvier 1988, un colloque est consacré à Foucault. En 1994, on publie Dits et écrits 1954-1988 (4 tomes, Gallimard; rééd. coll. « Quarto », 2 volumes) sous la direction de Daniel Defert et François Ewald avec la collaboration de Jacques Lagrange. En 1997, on publie son cours Il faut défendre la société (Gallimard-Seuil) donné au Collège de France en 1975. En 2001, on publie son cours L`Herméneutique du sujet (Seuil) donné au Collège de France en 1981-1982.
Choix de citations
Sur la folie :
« De l`homme à l`homme vrai, le chemin passe par l`homme fou ».
Histoire de la folie à l`âge classique, Plon, 1961.
Sur la psychologie :
« Jamais la psychologie ne pourra dire sur la folie la vérité, puisque c`est la folie qui détient la vérité de la psychologie ».
Maladie mentale et psychologie, PUF, 1962.
Sur l`homme :
« L`homme est une invention dont l`archéologie de notre pensée montre aisément la date récente. Et peut-être la fin prochaine ».
Les Mots et les Choses, Gallimard, 1966.
Sur l`histoire :
« L`être humain n`a plus d`histoire ou plutôt, puisqu`il parle, travaille et vit, il se trouve en son être propre, tout enchevêtré à des histoires qui ne lui sont ni subordonnées ni homogènes ».
Les Mots et les Choses, Gallimard, 1966.
Sur le pouvoir :
« Le discours, en apparence, a beau être bien peu de chose, les interdits qui le frappent révèlent très tôt, très vite, son lien avec le désir et avec le pouvoir. Et à cela quoi d`étonnant : puisque le discours – la psychanalyse nous l`a montré –, ce n`est pas simplement ce qui manifeste (ou cache) le désir; c`est aussi ce qui est l`objet du désir; et puisque – cela, l`histoire ne cesse de nous l`enseigner – le discours n`est pas simplement ce qui traduit les luttes ou les systèmes de domination, mais ce pour quoi, ce par quoi on lutte, le pouvoir dont on cherche à s`emparer ».
L`ordre du discours, Leçon inaugurale au Collège de France, 2 décembre 1970, Gallimard.
Sur la matière et l`esprit :
« Le corps ne devient force utile que s`il est à la fois corps productif et corps assujetti ».
Surveiller et punir, Gallimard, 1975.
Sur les pouvoirs sociaux :
« Le pouvoir n`est jamais localisé ici et là, il n`est jamais entre les mains de certains, il n`est jamais approprié comme une richesse ou un bien. Le pouvoir fonctionne. Le pouvoir s`exerce en réseau et, sur ce réseau, non seulement les individus circulent, mais ils sont toujours en position de subir et aussi d`exercer ce pouvoir ».
« Il faut défendre la société » : cours au Collège de France (1975-1976), Le Seuil, 1997.
Pierre Lemay a enseigné la philosophie au Cégep de Trois-Rivières de 1977 à 2014, année de sa retraite. Il a été adjoint au coordonnateur du Département de Philosophie du Cégep de Trois-Rivières en 1980-81. Il est membre-fondateur de la Société de Philosophie du Québec (SPQ) en 1974. Il fut également archiviste-adjoint de la SPQ en 1981 et 1982 et membre du Comité de rédaction du Bulletin de la SPQ de 1981 à 1984. Il est aussi membre-fondateur de la Société de Philosophie des régions au coeur du Québec en 2017. De plus, il est membre de l`Institut d`histoire de l`Amérique française depuis 1993 et membre de la Corporation du Salon du livre de Trois-Rivières depuis 2015. Il collabore à PhiloTR depuis sa création en 2004.