« Le commencement d’un monde »
Trois-Rivières, église Saint-James, rue des Ursulines
dans le cadre des Philoconférences
le mercredi 11 février 2009, de 19h30 à 21h30
Ancien grand reporter au quotidien Le Monde, après avoir couvert durant vingt ans les tragédies du globe, Jean-Claude Guillebaud conserve un tempérament optimiste. Pourquoi? Réponse de Guillebaud : «J’ai toujours trouvé dans les pires situations des hommes et des femmes qui ne désespéraient pas.»
Guillebaud ajoute que «le monde va objectivement moins mal qu’avant.» Il nous parle de l’Association Reporters d’Espoirs dont l’objectif est de faire connaître de l’information «porteuse de solutions».
Et Guillebaud d’ajouter quelques exemples :
1) «La liberté a beaucoup progressé dans le monde par rapport à 1975, regardez en Amérique du Sud et dans l’ancienne Europe de l’Est.»
2) «Un milliard d’êtres humains vivent avec moins de 1 dollar par jour, c’est vrai; mais il y a peu de temps, ils étaient deux milliards.»
3) «En Inde, on se retrouve maintenant avec une classe moyenne de 350 millions de personnes.»
4) «Le terrorisme est abject. Il fait 1000 morts par an. Mais c’est deux jours de bombardements à Londres durant la guerre.»
C’est pourquoi l’optimisme reste permis. Mais il faut pour cela éviter le piège de la «prophétie autoréalisatrice» : à force de se conditionner au pire, le pire arrive; à force de tout voir en noir, aucune place n’est réservée à la lumière.
Guillebaud propose d’adopter une «stratégie optimiste». Car il croit qu’il «est plus intelligent d’être optimiste que pessimiste.»
Ce « moment axial » se traduit par 4 révolutions majeures :
1) Une révolution économique : la mondialisation s’effectue à un rythme effréné, au point de la rendre quasi incontrôlable, d’où l’urgence de la harnacher.
2) Une révolution informatique : le web est devenu un 6e continent, un nouvel espace, qu’il faudra apprendre à penser. Chaque mois, en France, on numérise 3000 grandes œuvres. On peut, de chez soi, visiter le Louvre. Le monde est à la portée d’un clic.
3) Une révolution génétique : un enfant pourrait avoir cinq parents, le donneur de sperme, la donneuse d’ovocytes, la mère porteuse, le père et la mère. Comment l’enfant construira-t-il son identité? Là aussi, nous faisons face à de l’ « impensé ». Nos concepts familiers deviennent friables.
4) Une révolution écologique : les Chinois utilisaient le vélo, maintenant ils achètent des voitures. Un milliard trois cents millions de Chinois pour combien de voitures? En outre, les changements climatiques font craindre le pire. Sur ce point, Guillebaud se montre pessimiste. La pollution et l’hyperconsommation menacent l’avenir de la planète. Il faudra vite réagir, sinon nous sommes perdus.
Nous sommes donc au «Commencement d’un monde» (Éditions du Seuil), titre du récent essai de Jean-Claude Guillebaud qui résume ses thèses en rappelant ce mot de Goethe : «Le pessimiste se condamne à être spectateur.»
Christian Bouchard, enseignant de littérature retraité du Collège Laflèche et porte-parole, éditions 2018 et 2019, du FestiPhilo de Trois-Rivières.