Avatar photo

Patrice Létourneau est enseignant en philosophie au Cégep de Trois-Rivières depuis 2005. Outre son enseignement, il a aussi été en charge de la coordination du Département de Philosophie pendant 8 ans, de juin 2009 à juin 2017. Il est par ailleurs l'auteur d'un essai sur la création, le sens et l'interprétation (Éditions Nota bene, 2005) ainsi que d'autres publications avec des éditeurs reconnus. Il collabore à PhiloTR depuis 2005.

La semaine dernière, les médias faisaient état de la position de deux chercheurs du Centre de recherche en éthique de l’Université de Montréal (Daniel Weinstock et Marc Zaffran, alias Martin Winckler), qui stipulent que les bonnes séries télévisées ont un impact important sur les sociétés et qu’elles peuvent contribuer à la conscientisation sociale et l’avancement des débats publics (voir par exemple 1 et 2).  Selon ceux-ci, bien que fréquemment considérées par les universitaires (selon eux) comme un sous-produit culturel peu digne d’attention, «les bonnes» téléséries joueraient à notre époque un rôle social analogue aux romans-feuilletons du 19e siècle, ce genre littéraire controversé auquel contribuèrent notamment des écrivains tels qu’Honoré de Balzac, Charles Dickens, Fedor Dostoïevski…


Bien sûr, face à une telle affirmation, on peut se demander ce qui peut légitimement être inclus sous le vocable de «bonnes téléséries» (Weinstock et Zaffran citent principalement des téléséries états-uniennes), question d’autant plus importante qu’il convient de faire attention pour ne pas tomber dans une naïve confusion amalgamant l’influence de «l’air du temps» avec ce qui pourrait être les mirages d’une idole du Progrès.  Toutefois, puisque là ne semble pas être l’essentiel de leur propos, laissons ici cette question en suspend ; mais rappelons au moins (pour rendre à César…) que quoique dans la foulée de leur prise de position publique il ait été mentionné que les intellectuels ont trop souvent «boudé» cet aspect de la culture populaire, il faut tout de même dire que diverses personnes travaillant en philosophie s’y sont intéressées.  

Aussi, il faut au moins mentionner la collection «The Blackwell Philosophy and Pop Culture Series», qui est riche de plusieurs analyses de téléséries, films, dessins animés et de la musique populaire, le tout à la lumière de la philosophie.  Ainsi, on y trouve des livres traitant entre autres de la télésérie Dr House, de 24, de Lost, des dessins animés South Park, de Terminator, etc.

En ce qui a trait à une prise en considération plus large de la culture populaire allant au-delà du seul angle des téléséries, soulignons au passage que, du côté francophone, les Presses de l’Université Laval viennent de lancer (en 2009) une nouvelle collection sous la direction de Normand Baillargeon et Christian Boissinot : «Quand la philosophie fait pop!» (où, dans le premier ouvrage de cette collection, on peut notamment lire Jean Grondin à propos du Hockey [mise à jour : voir cet article, ainsi que celui-ci et celui-là]).  Par ailleurs, Jean Laberge a publié à l’automne 2008 En quête de sens, un livre qui poursuit l’amorce qui eut lieu avec quelques-unes de ses contributions aux «Devoirs de philo» (voir par exemple 1 , 2 , 3 , 4) ou autres.

D’ailleurs, bien qu’on s’écarte de la culture strictement télévisuelle et que ses visées sont beaucoup plus larges, en parlant de culture populaire, il serait dommage de passer ici sous silence l’initiative des «Devoirs de philo» (depuis février 2006).

Mise à jour (10 juin 2009) : en français, les Éditions Ellipses viennent de publier Philosophie en série.