[NDLR : article originaire de La Dépêche]
Texte de Luc Morin, enseignant au Département des Mathématiques.
Depuis mon entrée au collège, il m’a été donné d’enseigner plusieurs cours de mathématiques dont le cours Mathématica du programme Histoire et civilisation. Un très beau cours de mathématiques, offert par le département de mathématiques, quant à son contenu original.
Je ne donne plus ce cours, mais depuis quelques années, j’ai le plaisir de côtoyer les étudiants du programme Histoire et civilisation le temps d’une communication. En effet, je réponds à l’invitation de leur professeur de mathématiques actuel, mon collègue, Louis Duchemin. Cet enseignant offre toute une palette de couleurs mathématiques à ses étudiants.
Le cours Mathématica permet à l’étudiant de comprendre le rôle et l’influence des mathématiques dans la civilisation occidentale. Il lui permet de prendre conscience des liens qui unissent les mathématiques avec les arts, les sciences et l’éducation.
Cette année, le titre de ma communication était « Les mathématiques – Fer de lance contre les maladies infectieuses?! ». Les étudiants du programme Histoire et civilisation ont eu l’occasion de voir le rôle des mathématiques dans le domaine des sciences de la vie – plus précisément du rôle que joue la modélisation mathématique dans le domaine de l’épidémiologie; cette « science de ce qui s’abat sur le peuple ».
Ils ont découvert en autre chose, au cours de cette communication, que la première incursion des mathématiques en médecine a été faite par le mathématicien suisse Daniel Bernoulli au milieu du XVIIIe siècle. Bernoulli a élaboré un modèle mathématique pour estimer les avantages de l’inoculation de la petite vérole (variole). À l’époque (18e siècle), l’inoculation n’était pas sans risque. On pouvait en mourir et cela donna lieu à un débat pour savoir ce qu’il fallait faire; risquer une mort prématurée due à l’inoculation immédiate ou prendre le risque de mourir dans un avenir plus ou moins lointain en attrapant naturellement la maladie. Bernoulli montra un gain de 3 ans d’espérance de vie par l’inoculation grâce à sa modélisation mathématique! Les étudiants ont aussi découvert que la modélisation mathématique peut aider les décideurs à déterminer quels facteurs sont importants pour ralentir, voir éradiquer une maladie infectieuse. C’est le cas notamment avec la maladie parasitaire la dracunculose où le modèle mathématique de la propagation de cette maladie a permis de cibler les efforts à faire pour que celle-ci régresse au point où elle est presque éradiquée aujourd’hui. Le modèle suggérait de faire chuter le taux de natalité du parasite en utilisant le pouvoir de l’éducation comme arme efficace contre cette maladie!
Les modèles mathématiques sont une représentation simplifiée d’une réalité. Bien que faux par nature, ils permettent néanmoins d’étudier la dynamique complexe des phénomènes de notre monde. Leur utilité est précieuse pour les décideurs en santé publique, car ils leur permettent d’améliorer la cohérence et l’efficacité de leurs actions. D’un point de vue éthique, l’utilisation de modèles mathématiques dans l’étude de la propagation d’une maladie infectieuse est la seule solution possible.
Les mathématiques sont un langage, un langage universel dont l’utilité est sans pareil pour les sciences de la vie; et les sciences en général.
Luc Morin, enseignant au département des mathématiques
Luc Morin est professeur de mathématiques au Cégep de Trois-Rivières depuis 1990. Il est titulaire d’un Baccalauréat en mathématiques, d’une Maîtrise en biophysique et biologie moléculaire, et est doctorant en sciences de l’environnement.