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Patrice Létourneau est enseignant en philosophie au Cégep de Trois-Rivières depuis 2005. Outre son enseignement, il a aussi été en charge de la coordination du Département de Philosophie pendant 8 ans, de juin 2009 à juin 2017. Il est par ailleurs l'auteur d'un essai sur le langage, le sens et l'interprétation (Éditions Nota bene, 2005), ainsi que d'autres publications avec des éditeurs reconnus. Il collabore à PhiloTR depuis 2005. (Article sur PhiloTR | Site personnel)

Une petite bombe.  C’est cette délicate et périlleuse question, touchant au devenir du Québec, que pose la revue Argument dans son dernier numéro (vol. 10, nº 1, automne 2007-hiver 2008).  À l’occasion de sa dixième année d’existence, la revue argument a décidé de consacrer un numéro «centré sur la situation actuelle du Québec», de telle sorte que cette «interrogation, dirions-nous existentielle, forme le corps de ce numéro autour duquel gravitent diverses interventions qui portent, par d’autres biais, sur le même objet.» (p. 3).  Comme on pourra le constater, c’est tout qu’un menu…


Dans un article intitulé La fatigue politique du Québec français II (un titre qui évoque évidemment La Fatigue culturelle du Canada français de Hubert Aquin), Daniel Jacques interroge «l’opération rhétorique» de la Révolution tranquille, qui se présentait en opposition à une Grande Noirceur, dans la reformulation de l’identité collective qui s’est alors opérée, avec un déplacement des repères symboliques de la religion vers la culture.  Il avance alors l’idée que «ni la nation canadienne-française, ni la nation québécoise ne sont essentiellement ni principalement de nature politique», ce qui minerait profondément l’idéal d’indépendance.  Dans cette perspective, il tente d’identifier les impacts, en ces circonstances, d’un maintien de l’idéal d’indépendance.

Jacques Beauchemin, quant à lui, aborde la question sous l’angle d’un rapport problématique avec la modernité, l’individualisme et ce que l’on appelle une «société des identités».

Pour sa part, Mathieu Bock-Côté cherche à penser les résultats des élections du 26 mai 2007 tout en tentant de mettre en relation la question de l’indépendance avec l’opposition au conservatisme qui est entretenue par ce qu’il appelle «les élites» au sein du projet souverainiste.

Enfin, avec une prose singulière (qui d’ailleurs, en fin de compte, est peut-être plus instructive qu’il ne pourrait y sembler à première vue), François Charbonneau examine la question de l’indépendance dans un contexte où elle n’apparaît plus comme une nécessité face à une oppression manifeste, mais où elle apparaît plutôt comme un «choix», comme une liberté à assumer (ou non).

Comme c’est le cas à chacun des numéros d’Argument, des pages sont consacrées à un échange «autour d’un livre», soit, dans ce numéro, La culture québécoise est-elle en crise?, de Gérard Bouchard et Alain Roy, aux Éditions du Boréal (2007).  Ainsi, en commentaire, Olivier Kemeid revient sur les cycles de crise au Québec (au XXe siècle) et Évelyne De La Chenelière traite de la pratique théâtrale au Québec dans une perspective qu’on retrouve rarement affichée publiquement.

Dans la section «retour sur une œuvre», l’année 2007 ayant marqué le dixième anniversaire de la mort de Fernand Dumont, Argument publie le texte de conférence d’ouverture que celui-ci a présenté au Congrès mondial de philosophie, qui avait eu lieu à Montréal, en août 1983.  Ce texte, qui est toujours d’actualité (et même, d’une étonnante actualité), aborde la crise de la culture, la mémoire collective et cette condition du monde humain environnant où ce serait «par le bas, à partir du terreau le plus humble, que nous devons recommencer.  […] reprendre les chemins du dialogue dont les philosophies, toutes ensemble et depuis toujours, sont le vivant exemple de culture.» (p. 100).  Dans cette même section, Serge Cantin – qui d’ailleurs discutera de la culture à la prochaine philoconférence – signe un texte ayant pour thème Philosophie et culture chez Fernand Dumont.

Enfin, en «contributions libres», on retrouve un article d’Éric Bédard intitulé Souveraineté et hypermodernité – La trudeauisation des esprits, ainsi qu’un texte de Marc Chevrier à propos d’une possible constitution du Québec.

Costaud, ce numéro…

Référence :
Titre de la revue : Argument.  Politique, société, histoire
Id : Volume 10, numéro 1, automne 2007-hiver 2008
Titre du numéro : Devons-nous en finir avec l’indépendance?
Éditeur : Les Presses de l’Université Laval
Pages : 188
Issn : 1481-3971  /  Ean 13 : 9-771481-397002
Prix : 14$ (CAD)
Site Web :  http://www.revueargument.ca/
(Déclaration à propos de l’esprit, du contenu et de l’équipe de la revue)